Quand je vous le dis :
par Martine Montémont

 

 

« Les bateaux qui mettaient 3 ans pour une expédition au Chili et 5 ans ½ pour les Indes embarquaient des centaines de rats redoutables pour les marchandises. Pour s’en débarrasser, des chats affamés étaient lâchés dans la ville et il était strictement interdit, par arrêté municipal, de les tuer et/ou de les nourrir. »

 
Vidéo Saint-Malo intégraleAux sources de l'Esprit de Beurre Bordier à Saint-Malo (35). Voir la vidéo intégrale... (8:04)
 

Au niveau de la longueur du littoral, le département d’Ille-et-Vilaine n’essaie même pas de se mesurer avec les centaines de kilomètres de côtes et d’îles du Finistère. Mais sur les quelques 80 kilomètres qui bordent la mer, c’est un concentré de merveilles et de symboles bretons. Dinard et l’embouchure de la Rance qui sépare la jolie ville adorée des Anglais de la cité corsaire de Saint Malo... 

S’il faut un prétexte, ce sera celui-là. Du 11 au 13 novembre, une centaine d’artisans et producteurs présenteront leurs spécialités aux amateurs éclairés de bons produits sur les quais au cours de la manifestation Chefs & Saveurs et pour les amateurs de BD, le Festival Quai des Bulles se déroule justement les 28, 29 et 30 octobre.

Corsaires à l’abordage !

Dès que l’on rejoint Saint Malo par le bord de mer, on est capturé et captivé par la ville close qui va dérouler toutes ses portes les unes après les autres le long des quais. Impossible d’y échapper et tant mieux. De la Porte Saint Vincent à la Porte Saint Thomas, les remparts mesurent 1754 mètres. Ils sont classés Monuments Historiques depuis 1921.

Il n’y a pas de saison à privilégier pour explorer les remparts et se perdre dans les ruelles, ni non plus pour visiter les quelques 112 malouinières de l’arrière-pays, ces résidences de villégiature des riches armateurs, sinon que l’on est plus tranquille que pendant le plein été. Mais avant, une visite de la Demeure de Corsaire de l’hôtel Magon s’impose. Histoire de savoir à qui on a affaire et de faire une fois pour toute la différence entre les corsaires et les pirates.

Les premiers sont légitimes, reconnus, honnêtes commerçants en temps de paix et cordiaux adversaires en temps de guerre. Les seconds sont de féroces hors-la-loi.

 

C’est la famille de La Rivière qui veille aux destinées de cette belle demeure entièrement classée Monument Historique et c’est le fils, historien compétent et enthousiaste, qui accompagne les visiteurs et leur raconte la vie des riches commerçants de la mer avec un humour mordant.

 «Le commerce et les armateurs étaient très prospères à Saint Malo et la fraude fiscale systématique. Les terrains à construire étaient vendus équipés d’un souterrain de 3 m sur 3 pour passer avec une charrette et déplacer à toute vitesse les tonneaux de marchandises d’une maison à l’autre en cas de contrôle. 45 maisons étaient ainsi raccordées entre elles sur une distance qui représentait la moitié de la longueur des remparts ! »

  


On apprendra ainsi qu’à la période bénie où Saint Malo était un port de commerce de renommée internationale spécialisé dans le négoce des épices, des cotonnades indiennes et des porcelaines de Chine entre la fin du XVIème siècle et celle du XVIIIème siècle, il y avait environ 130 armateurs qui commerçaient entre les Indes et les grossistes en France. C’est la Révolution Française qui a donné un coup d’arrêt total à cette richesse dont profitait tout le monde. Les entrepôts dans lesquels étaient stockés les tonneaux de marchandise ont été transformés en prison pour les femmes sous la Terreur.

Le seigneur du beurre.

Saint Malo est une ville gourmande et elle déguste la terre et la mer avec un égal bonheur. Mais elle abrite en ses murs un artisan extraordinaire. Tous les clients des grandes maisons convenablement étoilées connaissent le beurre Bordier et les gourmands savent le trouver chez les meilleurs crémiers dans la France entière.

Jean-Yves Bordier est un homme généreux et chaleureux. Il est tombé dans une cuve de crème normande à la naissance. C’est-à-dire qu’il est fils et petit-fils de fromager et qu’il baratte depuis 35 ans. Son produit est incomparable et il en a élevé la fabrication au rang du grand art. C’est-à-dire qu’il le fait comme il faut le faire et qu’il l’écoute chanter.

 

 

Dans la ville close de Saint Malo, on peut faire emplette de tous ses produits et les rapporter dans des emballages spéciaux qui les conservent très bien. Il a mis au point des recettes de beurre finement et précisément aromatisé.

Le beurre de framboise à déguster avec un magret de canard, le beurre au sarrasin qui fait merveille sur une langouste rôtie, le beurre au yuzu, cet agrume japonais haut en goût, le beurre d’algues naturellement et une demi-douzaine d’autres au rythme des saisons. Il propose même des recettes pour mieux en tirer parti à la maison.

Une dizaine de variétés est présentée à la dégustation sur la table du restaurant qui jouxte la fromagerie, le Bistrot « Autour du beurre » entre les mains du chef Steve Delamaire est un modèle de maison de qualité. Les prix y sont incroyablement raisonnables dans leur registre et il ne désemplit guère. À l’ardoise par exemple, les fleurs de courgettes farcies et assiette de légumes au beurre fenouil, l’aile de raie rôtie au beurre à la framboise, fricassée de girolles et artichauts camus, quasi de veau au beurre sarrasin et pommes de terre caramélisée au jus de viande…

 


« Un vrai moment de grâce que cette brève mais dense rencontre avec Jean-Yves Bordier et le déjeuner au restaurant servi par un personnel aussi chaleureux que le patron. Contrairement à ce que l’on pourrait penser les vrais bons restaurants de cette nature sont plus rares que l’on ne croit ! » 

Même en ne bougeant pas de Saint-Malo, il y a vraiment de quoi passer un excellent séjour. On poussera par exemple jusqu’au petit hôtel Les Charmettes pour profiter dedans ou dehors de sa vue panoramique sur la plage du Sillon et aussi des séjours spéciaux organisés à l'occasion des grandes marées. C’est que là-bas,  juste en face du Mont-Saint-Michel, ça déménage !

On y va par le train !

Quand on est parisien, on a pris l’habitude de se rendre en Bretagne en TGV jusqu’à Rennes. Mais on n’y pense moins depuis Lyon et même Marseille. Expérience faite, c’est tout simplement extra ! De centre-ville à centre-ville sans être obligé de surveiller le poids des bagages et avec 3 allers-retours quotidiens toute l’année et davantage en été.

Sur place, on bénéficie aussi d’un réseau de TER qui permet de se passer de la voiture, des embouteillages et des PV pour excès de vitesse par surprise (pas vu le panneau provisoire derrière le camion !)

Mais la bonne nouvelle, c’est que la totalité de la ligne à Grande-Vitesse Bretagne-Pays de Loire sera mise en service en juillet 2017. Ce qui permettra aux Parisiens de gagner entre 30 et 40 minutes sur le voyage et environ 25 minutes en moyenne depuis ou vers Lyon.


Opportunités récentes